Verdun
TRENTE JOURS DE SOLITUDE


J’approche de Verdun...
...et la journée s’est plutôt bien passée.
Il a fait un peu moins chaud, mais ce soir le temps se gâte. Je suis sous ma tente, le tonnerre gronde autour de moi. Quelques grêlons sont tombés, mais pour l’instant, la tente tient bon : pas une goutte ne passe.
Quand Stéphanie est venue chercher Biscotte, je lui ai demandé de me ramener mes chaussures de sécurité et mon sac à dos. Étonnant, non ? Pourtant, pour cette aventure, j’étais bien équipé : bonnes chaussures de randonnée, chaussettes techniques, pantalon adapté…. Je devais également alléger mon paquetage. Je suis partie de Strasbourg avec pas grand chose, après avoir fait un ultimes tri, je repars de cette aire de repos avec encore moins. Comme quoi on pense partir avec le minimum minimum et malgré tout il y a toujours des affaires en trop. En pensant à mon équipement, j’ai pensé à ce pauvre Ugolin dans Manon des Sources. Le Papé lui avait dit d’acheter un joli costume pour aller chanter sur les hauteurs d'Aubagne son amour "je t’aime Manon des sources). Vous connaissez tous cette belle histoire… qui s’est si mal terminée pour lui.
Eh bien moi, je vais peut être rentrer à la maison demain. Ma Manon à moi, c’est Stéphanie. Tout ça pour dire qu’un bon équipement ne fait pas forcément un bon marcheur. Mes chaussures haut de gamme et mes super chaussettes n’ont pas fait bon ménage avec mes pieds. J’ai mal au pied droit. Comme quoi, l’habit ne fait pas le moine. Malheureusement, le mal est fait.
Il y a deux jours, sur un sentier du GR complètement retourné, je me suis légèrement tordu la cheville à deux reprises. J’ai continué, en compensant, en marchant le pied de travers. C’est également sur ce terrain que biscotte c'est blessé.
J’ai aussi pensé à ce pauvre bossu dans Jean de Florette. Celui qui allait chercher de l’eau sous une chape de plomb, en sueur… Un peu comme moi sous le soleil de la première semaine.
Finalement, je marche désormais avec mes chaussures de sécurité (merci LM… mais chut, faut pas le dire !). Ça va un peu mieux, mais je suis obligé de poser le pied de travers à cause de la douleur. J’espère que ça ira mieux dans les jours à venir, car je commence à compenser avec la jambe gauche… et ce n’est pas terrible non plus.
Cela fait maintenant une semaine que je marche environ 30 km par jour. Petit à petit, j’apprends à m’organiser pour manger, boire et dormir. Je n’avais pas mesuré à quel point le moral dépend de mille petites choses. Je dois vous avouer qu’après les deux premiers jours, il était au plus bas. Difficile de retenir mes larmes quand je parlais à un membre de la famille.
Et puis, je me suis rendu compte que l’alimentation jouait un rôle essentiel. Depuis, je fais bien plus attention à ce que je mange.
Aujourd’hui, c’est le premier jour où le moral est vraiment là. Je me sens enfin pleinement entré dans cette aventure. Ce serait dommage de jeter l’éponge à cause d’une paire de chaussures pourtant réputées, à plus de 300 euros… et avec lesquelles j’ai déjà fait quelques kilomètres, pourtant.
Ah, et autre leçon du jour : j’ai appris à mes dépens que dans les cimetières militaires, il n’y a pas d’eau. Résultat : une marche de 32 km alors que j’en avais prévu 25 maximum, à cause de mon pied douloureux… douleur qui remonte maintenant jusqu’à la fesse droite.
Il est temps pour moi de dormir. L’orage bat son plein, et parfois me fait sursauter. Je me suis installé sur une aire pour camping-cars, à moins de 100 pas d’une salle des fêtes. Et devinez quoi ? Ce soir, il y a une soirée avec musique et chants folkloriques.
Après les cloches, la musique…




