Mes deux premiers jours
TRENTE JOURS DE SOLITUDE


Me voilà dans ma deuxième journée.
Mon premier bivouac a eu lieu sur les hauteurs de Romanswiller, et j’ai eu une pensée particulière pour Marc Haeffele. J’entendais, jusque tard dans la nuit, des espèces de "prédateurs motorisés" qui faisaient plus de bruit qu'ils ne roulaient vite. C’est dans ces moments-là que je prends encore plus conscience de la pollution sonore qui envahit notre quotidien.
Pour cette première journée, j’ai été accompagné par Stéphanie, qui nous a quittés au dixième kilomètre. J’ai ensuite poursuivi mon chemin avec mon frère jusqu’au bivouac, au kilomètre trente-cinq. Au moment où il m'a laissé (merci à ma belle-sœur pour les délicieux cookies qu’elle m’avait apportés !), j’ai ressenti un pincement au cœur.
Dans notre famille, on n’a pas vraiment l’habitude de montrer ses sentiments...
Me voilà seul dans mes pensées.
Vous pouvez imaginer que, lorsque l'on est seul, les souvenirs remontent rapidement à la surface. Mais pour le moment, ce sont surtout les premières douleurs qui occupent mon esprit.
Mes épaules ne sont vraiment pas épargnées : huit heures d’affilée avec 18 kg sur le dos, c’est éprouvant.
Pour ménager mes pieds, je dois faire une pause d’une heure tous les dix kilomètres afin de retirer mes chaussures.
Ces premiers jours, je dois être très attentif aux frottements pour éviter les ampoules.
Au moment où je vous raconte ces premiers instants, je suis du côté de Dabo, installé sur une terrasse ensoleillée, bien loin de ma "fabrique".
Sur cette terrasse, il n’y a que des personnes âgées, celles pour lesquelles vous travaillez aujourd'hui. Elles sont là, tranquilles, racontant leur quotidien autour d’une bière ou d’un café ; la bonne humeur est bien présente.
Sur mon chemin, je ressens parfois les regards, mais je ne suis pas sûr qu'ils soient pour moi… Peut-être plutôt pour Biscotte ! Un chien avec un sac à dos, ce n’est pas commun.
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Fin de ma deuxième journée, à Dabo.
Je me suis arrêté chez un ancien collègue pour planter ma tente. Je dois avouer qu’il a dû être un peu surpris de ma venue, mais je ne regrette rien : l'après-midi a été rude, pour moi comme pour Biscotte.
Le sac que je lui avais confectionné lui a causé des blessures sous le ventre, à cause des frottements. Résultat : me voilà avec deux kilos supplémentaires sur le dos.
Heureusement, mon arrêt chez Arnaud — qui n'était pas prévu — m’a permis de déposer un peu de matériel pour m’alléger. Je n’avais déjà pas grand-chose, mais maintenant, j’ai encore moins !
La grande gagnante de cette histoire, c’est Biscotte : elle ne porte plus rien et, en prime, elle a reçu des soins particuliers à base d’argile, grâce à la compagne d'Arnaud.
Quand je suis arrivé au rocher de Dabo, j’en avais un peu marre.
Sur une portion de 500 mètres, les bûcherons avaient sérieusement abîmé le chemin...
Mais bon, me voilà installé pour une nuit "tranquillou" chez l’habitant.
Demain s’annonce encore difficile, mais après cela, les Vosges seront derrière moi.
Je me suis aussi rendu compte que mon GPS Garmin a parfois des bugs : au lieu de faire 10 kilomètres, j’en fais parfois plus…
Ou alors c’est moi qui débloque !
Mais bon, cela fait partie des aléas du parcours.


