La préparation
TRENTE JOURS DE SOLITUDE


Au début de mes préparatifs, j’imaginais transporter mes affaires avec un chariot de course. J’avais fait quelques modifications sur l’écartement des roues afin de réduire au maximum la largeur tout en la conservant suffisante pour éviter le basculement. J’avais ajouté une sorte de guidon relié à une ceinture pour pouvoir le maintenir autour de mes hanches, de manière à pouvoir lâcher les mains sans problème en marchant. Les premiers essais étaient plutôt positifs, et je pouvais tirer sans trop d’effort jusqu’à 25 kg.


Cependant, lors de ma première sortie avec un bivouac dans les Vosges, je me suis rapidement rendu compte que cela n’allait pas fonctionner. J’avais des problèmes de stabilité et, en même temps, je ne pouvais pas passer partout. Il faut reconnaître que les sentiers ne sont pas tous des boulevards comme la plupart des GR. L’idée de tirer plutôt que de porter était intéressante, mais j’ai dû faire un choix, et j’ai finalement décidé d’opter pour un sac à dos.
Un sac à dos, c’est très bien, à condition que son poids ne soit pas trop élevé. Idéalement, il ne devrait pas dépasser 15 kilos. Quinze kilos de matériel et de ravitaillement pour une nuit, ça passe, mais ma première véritable randonnée a duré huit jours, et j’en ai rapidement perçu les avantages et les inconvénients.
Le problème du sac à dos, c’est que tout est entassé à l’intérieur, un peu comme un gros bazar, et pour trouver un objet, il faut parfois tout vider. Vous me direz que je suis en randonnée, donc en vacances, et que j’ai le temps… Vous avez raison. Sauf que quand il fait beau, c’est gérable, mais quand il pleut et que tout est mouillé, c’est une autre histoire.
Un autre problème était lié au confort. Pour un casse-croûte rapide, tirer le sac et s’asseoir contre un arbre suffit amplement. Mais lorsqu’on part plusieurs jours, on ne mange pas uniquement des sandwichs : il faut aussi préparer des repas chauds, comme un café ou une soupe pour le soir. Bien souvent, il n’y a rien autour de soi, surtout si l’on bivouaque loin des villes et des villages.
En conclusion, le sac à dos avait des avantages, mais le confort n’y était pas. En cherchant une alternative, j’ai découvert la clayette de portage, similaire à celle des bergers qui passaient plusieurs mois en montagne lors de la transhumance. C’était parfait ! J’y ai fixé trois boîtes étanches : une pour le linge, une pour les aliments et une pour les petits accessoires. Cette solution me permet de poser mon réchaud dessus et, surtout, de voir immédiatement le contenu des boîtes sans avoir à les ouvrir, tout en évitant les risques d’infiltration d’eau.




J’ai pu tester cette méthode en 2022 lors d’un trek reliant Monpazier à Rocamadour en cinq jours, avec tout mon attirail : sac, tente et accessoires. Ce fut une bonne expérience. Heureusement, il n’avait pas plu, mais nous marchions sous 40 degrés avec 20 kg sur le dos. Le plus lourd à transporter était l’eau, avec un minimum de trois litres pour moi et ma Biscotte. Autant dire qu’à l’approche des cimetières, il n’y avait aucun problème pour se désaltérer et se laver avant le repas du soir. Il faut reconnaître que Napoléon avait eu une excellente idée en obligeant chaque village à installer un point d’eau potable pour ses troupes. Aujourd’hui encore, nous en profitons.
Malgré quelques galères, j’ai toujours gardé d’excellents souvenirs de mes sorties.
De temps en temps, on me demande ce qui me réjouit le plus dans mes randonnées. Je réponds sans hésiter : la liberté. Tous les tabous tombent, je ne perçois plus le regard des autres. Le quotidien métro-boulot-dodo disparaît, mais je sais aussi que cela ne dure qu’un temps. Quitter son confort me permet de prendre conscience de l’importance de ne pas gaspiller et de ne rien jeter. Lorsqu’on porte son matériel à la sueur de son front et à la douleur de son dos, on fait attention à tout. Même une simple goutte d’eau devient importante.

